Yang 24

The waist is the commander of the body
(YANG, Cheng-Fu)

La forme des 24 images (= la séquence de Pékin)

杨式二十四式简化太极拳

taijiquan – (séquence de) style Yang simplifiée à 24 figures

vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=wOkL34i9bMo

Autres (d’Amin WU) [2 x 6 min]
–> pour apprendre :
https://www.youtube.com/watch?v=e4VIw41R-PU&list=TLTfT3MPmGsQExNjA4MjAxNg .
–> ce que voit le spectateur :
https://www.youtube.com/watch?v=hou57TxCvCo&feature=em-subs_digest-vrecs

LISTE DES FIGURES

se préparer

1. commencement (suivi d’ ¼ tour à gauche)

2. du cheval sauvage (ye mã) séparer (fen) [* ] la crinière (zong)
[application martiale : http://www.taiji58.com/articles/video/164]

3. la grue blanche donne à voir un éblouissement d’aile
[C’est le fameux « la grue blanche déploie ses ailes »]

4. empaumer genou ; pas voltant

(Je refuse de traduire ‘lou xi’ par ‘brosser le genou’. Enserrer pourrait aller, l’idéogramme chinois ressemblant à celui d’une resserre à vin, lequel est élément formant de l’idéogramme qui désigne un restaurant, mais le placement du genou dans la paume n’est qu’esquissé – placement qui pourrait précéder un coup de pied donné par le bord latéral extérieur de celui-ci, en vietnamien sans accents, un ‘bang cuoc’ -. C’est la raison pour lequel je traduis ‘lou’ par ’empaumer’ : on n’a pas le temps de serrer le genou, si même on venait le placer dans la paume. ‘Xi’, c’est genou, et cela sans discussion.

Pour ‘ao bu’, j’ai longtemps laissé publiée cette traduction : pas filé, parce que l’idéogramme du caractère < ao > comporte l’évocation d’un fil  et que lorsque l’on confectionne un fil on tord ensemble tout en les étirant, les brins qui le constituent, et qu’il y a de cela dans le mouvement ; mais pas vrillé évoque mieux le mouvement du bassin que pas filé qui évoque plutôt une façon de glisser les pieds au sol ou bien une idée de continuité. Donc : pas vrillé. Et donc, pourquoi pas, cet équivalent anglais, la fameuse expression ‘twisted step’, difficile à traduire en français.)

5. jouer du p’i p’a

6. (à reculons), repousser le singe

7. saisir la queue de l’oiseau (à gauche)
ici se place un ½ tour à droite qui n’est jamais dans la liste des mouvements

8. saisir la queue de l’oiseau (à droite)

9. coup de fouet (un seul)

10. les nuages (litt. : mains nuages)

11. coup de fouet (un seul)

12. évaluer la hauteur du cheval

1/8 tour à droite

13. repousser du pied droit

14. une paire de vents traversent les oreilles

15. repousser du pied gauche
(après 1/2 tour (à g.))

16.
le serpent qui rampe
suivi de
le coq d’or debout sur une patte

17.  idem (mais en miroir)

18. la fille de jade enfonce (sa) navette

19. une aiguille au fond de la mer

20. (ouvrir) l’éventail (et en ressentir l’effet) jusque dans le dos
[ce faisant, on a effectué 1/4 t à d.]

21. en progressant : revers (d’une main), se couvrir, frapper
[et ce après un autre ¼ tour à droite]

22. fermer, verrouiller

(« ru »… « ssi » —> disons.
En chinois, il y a ‘apposer des scellés quand on a fermé’ mais les deux termes de cette proposition sont peut-être présentés dans l’ordre inverse et sans aucune indication de leur succession dans le temps ; d’où ce ‘disons’, qu’on trouve traduit par « comme… comme… » : au lecteur de comprendre ce que l’auteur a voulu dire et, n’a pas su ou pas pu dire mieux
).

23. moissonner puis croiser les poignets
[Et ce après ¼ tour à d.]

[On croise les mains (shou) poignet contre poignet.
Antoine Ly et Marianne Plouvier, quant à eux, dans leur « nouvelle lecture du taijiquan », You-Feng éditeur, Paris, 2013, ont traduit le chinois par « croisement d’avant-bras »
.]
Le croisement des poignets n’est que la fin du mouvement. Ici, je préfère retenir ce qu’on lit ailleurs : moissonner. On ramasse sa récolte (le produit de son travail).
Le croisement des poignets vient après. [Litt. = mains en position « 10 » mais l’idéogramme du nombre 10, c’est notre signe « + » ; ce qui donc pourrait se traduire par « mains en croix »]

24. fin

retour au début

NOTES.

Diverses applications martiales du taï-chi de style Yang  :
https://www.youtube.com/watch?v=ecjnoijaOyg&t=95s

Quelques-unes de la forme courte :

1. Retenir que le mouvement de début est suivi d’ ¼ tour à gauche.
Et qu’il est précédé d’un salut et d’un temps de préparation intérieure (mise en condition), lesquels sont hors la liste des 24 figures.
N.B. : Comme l’a montré Yang Cheng-Fu dans son manuel de 1934 avec photos, où il décrit sa forme longue, le mouvement de commencement pourrait se réduire à une simple rotation d’1/4 tour des avant-bras le long de leur axe longitudinal (à chacun) suivie d’un simple mouvement du poignet des deux mains qui au départ sont le long du corps : on met les paumes parallèles au sol.

2. « Scinde » plutôt que « sépare » ou « divise » car le cheval n’éloigne pas la crinière de son cou ni ne coupe ses crins en morceaux pour les partager à la ronde. Il fend sa crinière en deux parties qu’il écarte l’une de l’autre. Ces deux parties sont les bras du pratiquant et c’est la rotation du bassin qui donne l’impulsion à leur mouvement.

3. « Révèle », au lieu de « déploie », qui, en chinois correspond à un autre verbe, et pour rendre l’idée de lumière que contient le verbe liang. Il y a l’idée de faire voir, de montrer, de mettre au jour. Mais aussi liang chi peut évoquer notre expression poétique « un éblouissement d’ailes ». Comme si la grue nous disait : mes ailes, tu les as vues ? Non ! Tu ne les as pas bien regardées. Et… flits ! Elle montre en un instant ce qu’elle peut faire avec. Et on en reste ébahi. Rien à voir avec un grand oiseau blanc qui étendrait ses ailes au soleil pour les faire sécher ou les faire miroiter ou encore pour se rafraîchir le corps (c’est pourtant la 1ère chose à laquelle on pense quand on cherche à comprendre ce que la phrase chinoise veut dire.

* OU « se fie à ». Cf. : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5435279d/f40.image.r=annamite.langEN

4. Littéralement :
lou xi = empaumer genou (enserrer genou / entourer, du creux de son poignet, son propre genou, en arrondissant le bras. En allemand : umarmen. Enserrer parce que l’idéogramme chinois ressemble à celui qui désigne une resserre à vin et, partant, d’un lieu voisin où on en boit et où on mange et festoie, à savoir la grande salle d’un restaurant. Empaumer car tel est le geste exprimé par lou xi : on monte le genou dans le creux de la main).
ao bu =pas filé, voici pourquoi : « bu », c’est le pas, ici, un pied puis l’autre, dans une marche en avant
. L’idéogramme (j’allais dire le « nôm ») de bu montre, de gauche à droite, une main, de la soie, une force. Pour fabriquer un fil de soie, on étire des filaments de soie qu’on a groupé en brins, tout en tordant ceux-ci ensemble. Quand on travaille à la main, la réserve de filaments a été disposée sur une quenouille et le fil nouvellement fabriqué, on l’enroule sur un fuseau. Si la fileuse se sert de son fuseau pour étirer les brins de soie en fabriquant son fil, elle communique à son fuseau un mouvement de translationpar rapport à quenouille , puisqu’elle éloigne le fuseau de la quenouille et aussi un mouvement de rotation au fuseau – autour du grand axe de celui-ci. Ce mouvement est une image de ce que fait le pratiquant dans ce pas qui combine un mouvement angulaire du bassin et une marche en avant. A proprement parler, il faudrait dire « pas filant » mais comme le sens usuel du participe présent « filant » employé comme adjectif est un sens figuré, personne ne comprendrait qu’on l’emploie au sens propre (tordre et étirer, simultanément). D’où, faute de mieux, l’emploi, comme adjectif, du participe passé.

N.B. Quand on a attaqué en ao bu (cn), il suffit évidemment d’un rien pour se mettre en garde en gya-gamae (jp).

5. Le p’i p’a est un luth qui se tient verticalement. Je n’ose pas l’appeler un luth vertical. D’après ce que j’ai lu, l’apostrophe sert à noter une légère emphase, une « aspiration » (comme on dit du h de « haricot » que c ‘est un h aspiré), un petit silence entre la prononciation de la consonne et celle de la voyelle qui la suit.

6. Je garde le nom ancien de cette figure, poétique et qui a du sens (cf. les manuels illustrés de Yang Cheng-Fu, des années trente), de préférence à son nom officiel qui est très technique : rotation des humérus.

7. Le mouvement est dit « à gauche » car il commence par un peng de l’avant-bras gauche. L’oiseau dont on saisit la queue, c’est un passereau, un moineau, par exemple. Par « l’oiseau », on entend : « l’adversaire » et par « la queue de l’oiseau », le bras de celui-ci. Peng, lu, ji, an, c’est 4 manières, enchaînables les unes aux autres et qu’ici on enchaîne, d’esquiver une attaque et de contre-attaquer et qui ont toutes en commun une action de l’attaqué sur un bras ou les bras de l’attaquant.

8. Le mouvement est dit « à droite » car il commence par un peng – un contre – de l’avant-bras droit. On effectue le mouvement dans l’autre direction. C’est-à-dire vers l’Est si le mouvement n° 8 était effectué en direction de l’Ouest [C’aurait été le cas si on avait effectué le salut de départ face au Nord]. La convention générale de l’école du Roseau est d’appeler Sud le point cardinal auquel on fait face au départ mais cette convention n’est pas universelle : d’autres écoles, d’autres auteurs ont la même, et d’autres en adoptent une autre.

9. Il semble qu’en chinois le même mot serve pour désigner à la fois le fouet et le coup de fouet. Ici, c’est d’un coup de fouet qu’il s’agit. Et d’un seul, le texte insiste là-dessus, car sa traduction littérale la plus complète est  : « un coup de fouet, un seul ».

10. Littéralement, le nom de la figure, c’est le mot nuage(s) suivi du mot main(s). C’est donc : « les mains nuages ». Généralement, l’absence de verbe se pallie ainsi : on traduit par « mouvoir les mains comme des nuages ». Et c’est correct. Sauf, que ça occulte, encore une fois, le mouvement du bassin (mais il est vrai que celui-ci n’est pas dans le nom que la figure a en chinois).

11. C’est un seul coup de fouet, comme en 9. Ce n’est pas la main en crochet qui agit, c’est l’autre. Le bassin tourne dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, puis revient. Le coude du bras qui va frapper recule (en rotation) pour prendre son élan, puis prend sa course.

12. L‘analyse logique de la phrase chinoise gao tan ma peut être la suivante.
– Le mot gao, haut, hauteur, est un complément circonstanciel du verbe tan, qui le suit. C’est le sens de ce verbe qui permet de trouver le sens du complément : « quant à la hauteur ».
– L’idéogramme du mot tan comporte l’idéogramme de l’arbre. Initialement, il désigne la perche qui permet d’évaluer une profondeur. C’est un type de sonde. Le sens 1 de tan, c’est sonde, quand ce mot est employé comme nom. Et il s’emploie encore aujourd’hui pour désigner des appareils électroniques de mesure. Le sens 2 de tan, c’est sonder, car le même mot s’emploie aussi comme verbe. Il a aussi, nécessairement, le sens d’évaluer car la détermination d’une profondeur à la perche, c’est plus une évaluation qu’une mesure. On a aussi : jauge et jauger.
– Le mot ma, cheval, c’est le complément d’objet du verbe.
– Donc gao tan ma = quant à la hauteur, évaluer le cheval. Donc : quant à sa hauteur, évaluer le cheval. Et donc : gao tan ma = évaluer la hauteur du cheval.
– Mais le verbe a aussi pour sens chacun des verbes et expressions verbales suivants : observer, observer attentivement, scruter, épier, espionner. Surveiller, aussi.
– Cela renvoie à l’action du technicien des lumières qui suit sans cesse des yeux l’artiste qui est sur scène afin que celui-ci soit toujours placé dans le rond de lumière qu’il dirige.
Cela renvoie aussi à l’action du policier. A celle de l’éclaireur aussi qui s’en va voir ce qu’il y a chez l’ennemi et vient en rendre compte dans son camp (gao-tanma, c’est aussi un nom composé qui désigne l’éclaireur à cheval – scout en anglais car les enfants d’Albion ont choisi de mettre en avant un autre de ses talents : chez l’ennemi, l’éclaireur va aussi escouter [autrement dit : écouter ; escouter, c’est du vieux français]). Je ne suis pas Yang, Jwing-Ming qui écrit que gao tan ma, c’est l’action d’un cavalier qui, depuis une hauteur, scrute la plaine pour y chercher s’il y aperçoit son cheval. Car ça ne correspond pas au mouvement : on a une main devant soi, la paume vers soi, donc à une hauteur connue, on passe la main dessus est on la monte jusqu’à la poser sur le cheval près duquel on se trouve – on est près de l’épaule antérieure du cheval et on s’enva poser la main à la base de l’enolure, sur le dos à la naissance du cou. Puis les mains se séparent. L’une d’elles, si elle tenait une pomme, pourrait la proposer au cheval. L’autre caresse le flanc.
– Le cheval s’en va, on rassemble les mains tout en s’étant tourné de 45° vers la droite : c’est le mouvement suivant (repousser du plat du pied droit).

13. C’est du plat du pied qu’on repousse. Il ne s’agit pas d’un coup de talon, comme on peut le lire, et ce même dans les livres d’un bon éditeur français ! Deng jiao (cn) n’est pas kakato-geri (jp).
Pour voir ce que c’est que kakato-geri (en jiu-jitsu, par exemple), voir dans ces larges extraits du Habersetzer (oui, de larges pans de cette somme sont en ligne et accessibles gratuitement !!!).

14. Ici, on a traduit le nom de la figure qui figure dans le livre de Yang, Chen-Fu avec photos, de 1934 : 2 vents (contraires) traversent les oreilles [ 双风 ]. Le 1er caractère dit à la fois 2 et jumeaux, ou qui font la paire. , c’est donc une paire de vents (plutôt que des vents jumeaux, ce qui serait un faux sens). Le chinois ne précise pas que ces vents vont en sens contraire. En français, par contre il faut le préciser. Alors on peut se permettre de sous-entendre que ces vents sont de même force et supposer qu’il y a toutes les chances ou presque – que le lecteur se dira cela. D’une fait d’homophonies, la figure a un autre nom, qui se dit pareil mais ne s’écrit pas pareil et qui peut se traduire ainsi : entre les pics jumeaux aligner les oreilles. Les pics jumeaux, voire triplés, se rencontrent dans les reliefs calcaires (karstiques ?) du sud de la Chine et du Nord Viêt-nam. On tendrait entre de ces pics comme une corde à linge, sur laquelle les oreilles seraient enfilées, comme on le ferait d’antiques pièces de monnaies percées d’un trou carré, ou encore de coquillages, qui servaient de monnaie aux temps préhistoriques.

15. Ici, j’ai envie de faire seulement 1/4 t. à g., pour raison de symétrie des coups de pied par rapport à l’axe est-ouest (à supposer qu’on soit parti face au nord), mais Christian a montré 1/2 t. à g. et c’est aussi ce qui est montré sur un site offciel de l’enseignement secondaire chinois… Donc la figure officielle, c’est d’effectuer le 2ème coup de pied dans une direction diamétralement opposée à celle du 1er. Mais j’ai vu une vidéo d’1/2 en chinois où la dame qui enseigne le mouvement effectue 1/4 t + 3/8 t (comme je le sens) au lieu de 1/2 t + 1/ 8 t. … Pour bien réaliser le 1/2 t., préparer le mouvement en disposant le p. g. puis s’asseoir sur la jambeAR. Ca ne se voit nulle part, mais ça marche très bien !

Comme en 13, c’est du plat du pied qu’on repousse (dans l’un des épisodes de Zorro qui ont passé à la télévision française dans les années 1960 et dans les années 2010, on le voit se battre dans une taverne. Du pied, il repousse une table pour faire reculer d’un seul coup plusieurs adversaires placés derrière celle-ci. Voilà le mouvement dont il s’agit)

Entre les numéros 15 et 16 se place un 1/8° de tour à gauche qui n’est pas dans la liste des mouvements ; il s’effectue naturellement en reposant le pied gauche assez loin en arrière de soi mais vers l’avant si l’on considère la direction vers laquellle on va aller ; cela si on n’effectue pas de stance de transition, fouet levé.

16.1. « Le serpent qui rampe » : c’est le nom, consacré par l’usage, de la figure en français. Celui-ci rend compte à la fois du nom chinois moderne de la figure, lequel semble pouvoir se traduire aussi bien par « posture basse » que par « mouvement de descente » et de ce que l’on fait ensuite : avancer une main le long du sol.

16.2. « Le coq d’or debout sur une patte » : c’est le nom, consacré par l’usage, poétique et très juste, de la figure en français. Il s’agit d’un coq de faisan doré. Le nom chinois, voulu par le gouvernement révolutionnaire des années dix neuf cent cinquante, est technique et sans saveur  : debout sur un seul appui.
Au mvt n° 16, le coq, il finit debout sur sa patte gauche.

17. Au mvt n° 17, le coq, il finit debout sur sa patte droite.
(n.b. : il y a des stances debout, fouet levé, entre les numéros 15 & 16, d’une part, 16 & 17, d’autre partce sont des stances de passage ; il est possible de les supprimer pour simplifier l’apprentissage et la mémorisation de la séquence et de les rajouter ensuite, au risque d’être alors un peu perdu… La séquence que Christian nous a montrée comporte ces stances)

18. Littéralement : « introduit », plutôt que « manoeuvre », mais pas « lancer ». « Enfonce » va aussi. C’est ce qu’on a finalement retenu. Le jade est la pierre semi-précieuse de l’empereur. La fille de jade (par allégorie ainsi nommée) est céleste mais tisse elle-même [n.b. la tisserande, c’est aussi une constellation du ciel ; un fleuve la sépare d’un agriculteur qui est amoureux d’elle ; c’est la Voie lactée ; parfois, elle passe ce fleuve sur un pont fait d’oiseaux, à moins que ce ne soit lui…]. La navette dont il s’agit est une navette de tisserand et le métier à tisser, c’est un métier artisanal – comme on peut en voir à Marle (Aisne) au parc archéologique des temps mérovingiens – pas d’un métier industriel. D’où que la navette n’est pas lancée mais manoeuvrée. Lancer la navette est une expression qui nous vient du XVIII° siècle : la navette, mue par une impulsion de traction qu’elle a reçue sur sa pointe avant, ou bien par une impulsion de poussée qu’elle a reçue sur sa pointe arrière, court entre les deux nappes des fils de trame.  Ici, le tisserand / la tisserande tient la navette à la main [d’où je dis qu’il la manoeuvre], il l’introduit dans la foule [c’est ce qu’indique l’idéogramme chinois : une dent dans une cavité – et foule est le nom de cet espace aménagé par le tisserand entre les nappes de fil] l’y fait cheminer. C’est l’image d’un coup entre les côtes de l’adversaire. On le donne avec l’index replié. Une variante plus douce est de pousser de la paume le flanc de l’adversaire. Un fois que le fil de chaîne a été passé d’un bord à l’autre du tissu en cours de tissage, le tisserand le tasse contre la portion de fil de chaîne qu’il vient d’installer précédemment. D’où que l’attaquant place en hauteur et horizontalement son autre avant-bras. Il dégage ce qu’il y a devant lui et attaque avec l’autre bras. La navette ayant été poussée d’un côté (aller), le tisserand la pousse de l’autre pour la faire revenir à sa position initiale (retour) après avoir interchangé la position des nappes. La figure est double : frappe de la main droite, puis frappe de la man gauche. Et chaque demi-figure est double : un avant-bras dégage, au niveau haut, tandis que l’autre avance pour frapper, au niveau moyen. (En japonais : JODAN-TSUKI = niveau haut ; CHUDAN-TSUKI = niveau moyen ; GEDAN-TSUKI = niveau bas).  La séquence des coups, c’est à gauche puis à droite. Avec ceci que par rapport à la direction générale de la progression du pratiquant dans cette partie de la séquence, quand il frappe à gauche, il est tourné d’un 1/8 t. vers la droite et quand il frappe à droite, il est tourné d’1/8 t. vers la gauche. Comme il finit en frappant du poing droit (ou en poussant le flanc de son adversaire, de sa paume droite à lui), c’est son avant-bras droit qu’il abaisse vers le fond de la mer (vers le sol) à la figure suivante.

19. « Fond de la mer » étant le nom poétique du périnée, on pourrait penser à une attaque  dirigée vers le bas ventre (en effet, si on attaque obliquement de haut en bas et que mentalement on vise le plancher périnéal de son adversaire, immanquablement le bas ventre de celui-ci sera sur la ligne d’attaque), mais Yang Cheng-Fu fournit une autre interprétation du nom de la figure : si mon poignet a été saisi, j’adopte une position basse est descend de poignet le plus bas possible (donc jusqu’au sol, allégoriquement jusqu’au fond de la mer, et là, je l’agite de bas en haut et de haut en bas jusqu’à ce que mon adversaire lâche prise). On recule d’un 1/2 pas et c’est le bras droit que l’on descend. Dans notre style vietnamien, il vient alors par réflexe que l’on se protège alors la joue droite en mettant contre elle le dos de la main gauche.
N.B. Cela nous renvoie aux 1ers exercices de tui shou que nous avons effectué dans la classe de taï-chi de Tremblay en janvier 2013…

20. La lecture de la traduction du manuel de Yang Cheng-Fu,des années 1930, traduit du chinois en anglais par un Californien, puis d’anglais en français par un Français et où il décrit la forme longue Yang de 94 mouvements, et publiée en France en mars 2012, permet, en dépit des imperfections de ce travail, et si on s’aide des versions en chinois disponibles gratuitement sur l’internet de trancher entre différents noms de la figure 20, lesquels résultent d’homophonies ou de quasi homophonies en chinois et rendent les choses incompréhensibles. Ces homophonies sont  : 1. éventer/éventail et montagne et éclair / instant (au sens figuré) ; 2. dos / bras. En fait, un verbe est sous-entendu, le verbe ouvrir, et la phrase s’énonce : ouvrir l’éventail jusque dans le dos. En un éclair, ouvrir les bras, d’une part et en forme du caractère shan – la montagne – ouvrir les bras, d’autre part, sont deux traductions qu’il faut laisser de côté car elles ignorent le mot central, tong, qui veut dire mener à, en direction de, jusqu’à. Le mouvement consiste à faire décrire à la  main droite un arc de cercle vers le haut et vers l’arrière, tandis que le bras gauche reste immobile, oblique ou horizontal – si horizontal, la main gauche garde l’adversaire à distance — jusqu’à ce qu’on fasse « haut les mains ! » Si quelqu’un s’entend dire « haut les mains », il lève les mains ainsi qu’on fait ici : la  verticale de l’axe de sa tête, les verticales de l’axe de ses avant-bras et l’horizontale des bras dessinent le fer d’un trident (autrement dit le caractère shan, qui signifie montagne ) à cette différence près que le trait vertical central est plus court que les autres au lieu d’être plus long. Le qi circule alors bien le long de la colonne vertébrale, explique Yang Cheng Fu. On a fait ¼ tour à droite.

21.
= jìn (progrès) ;

= (1. le pas ; 2. la posture) ; d’où : jìn = progression, en progression, en progressant, en avançant… .

bān (déplacer [quelque chose de lourd]) ==> ici : parer, car associé chuí (le marteau), on a l’idée d’une masse (le marteau qui se tient à deux mains et qui a un long manche et qui sert aux forains à planter les piquets de la tente qui abrite le cirque), et parce qu’une fois le poing placé dans la main gauche on peut commencer l’exécution du mouvement en maniant les deux poings à la fois. Du bras gauche, renforcé du poing droit, on détourne un coup qui arrive d’en face, le bras droit défenseur appuie sur ce qui attaquait et, poursuivant son mouvement circulaire, le repousse vers le bas et sur le côté, puis vient se placer à la hanche armant le coup de poing qui sera donné tout à l’heure.

= lán ( barrer). L’autre bras passe devant la poitrine, le coude venant jusque devant l’estomac et l’avant-bras presque vertical, la paume à la hauteur du visage mais à la droite de celui-ci. Ainsi, ce bras et cet avant bras barrent le chemin  à toute autre attaque qui viendraient d’en face. En outre, si on ramenait le coude gauche vers le flanc gauche, le poing droit venant alors devant l’épaule droite, cet avant-bras droit s’inclinerait dans une position qui, pour la personne à qui appartient ce bras, serait, au sens héraldique du terme, une barre.La meilleure traduction est donnée en anglais par l’excellent dictionnaire de la télé de Hong-Kong ( http://hktv.cc ) : « to cut off, to hinder » – et ici, justement, le bras gauche effectue en une fraction de seconde l’action exprimée par ces 2 verbes anglais, successivement !

= chuí ( battre, piler, marteler – d’après le dictionnaire de l’agence Chine nouvelle – ; ici : cogner avec le poing , c’est une frappe canon, un direct du droit à l’estomac, avec toute la force qui vient de la hanche). n.b. Chuí ne désigne pas spécifiquement un coup horizontal. En effet ce terme est utilisé dans la forme Yang longue pour désigner un coup oblique vers le bas.

22. ru (pour ainsi dire, annonce le 1er terme d’une paire de 2 termes de sens proches) – feng (poser des scellés, ou plus exactement des scels ; donc aussi apposer des cachets mais en disposant 2 rubans ou 2 cordons en croix entre quatre pastilles de cire). L’étude du mouvement montre que l’idée sera mieux exprimée par notre verbe ‘verrouilller’ si (comme, mais ici : ‘ou’ ; annonce le 2ème terme de la paire) – bi (l’idéogramme « traditionnel » montre une porte à 2 battants et un hallebardier qui monte la garde devant celle-ci :  fermer, garder fermé ).

La 1ère partie de la figure, défensive, laquelle prépare la 2ème partie, offensive. Verrouillage des poignets pour une protection forte. C’est la 1ère partie de la figure. Sous cette protection, on prépare la 2ème partie. Dans la 2ème partie de la figure, on se débarrasse définitivement de l’adversaire par une poussée de mains (an) qui l’envoie balader loin, loin en arrière de lui-même.

23. = ¼ tour (à d.), [pousser les murs, récolter puis] croiser les mains

24. en 2 mots, le chinois dit tout ceci : « récolte, mise en ordre et fin (mouvement de) », mais si j’écris « récolte », le lecteur va confondre avec un mouvement qui s’effectue au début du n° 23. Peut être qu’en 23, on prépare physiquement et mentalement ce qu’on va effectuer purement mentalement en 24 : récolter le fruit de l’exercice et tout ordonner, tout apaiser.